En Israël, les affaires continuent avec l’Iran
Le groupe Ofer, dont l’un des fondateurs, Sammy Ofer, présenté comme l’homme le plus riche d’Israël, est décédé vendredi 3 juin, est au centre d’un scandale sur ses liens commerciaux supposés avec l’Iran.
Malgré les démentis officiels, le commerce entre les deux pays est important.
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L’État hébreu appelle inlassablement la communauté internationale à sanctionner l’Iran, son principal ennemi stratégique. Mais pour bon nombre de ses entreprises, l’argent n’a pas d’odeur. Le département d’État américain reproche ainsi au puissant groupe Ofer Brothers d’avoir vendu en 2010 pour 6 millions d’euros un bateau-citerne à la compagnie maritime iranienne Irisl, en violation de l’embargo de l’ONU frappant Téhéran pour ses activités nucléaires. Sur ce cas précis, la société plaide l’erreur.
Au fil des ans, les affaires avec l’Iran auraient ainsi rapporté 20 millions d’euros à la famille Ofer, propriétaire de la compagnie maritime Zim, dont une filiale basée à Singapour, la Tanker Pacific, contrôle la principale flotte de transporteurs de pétrole brut, avec 45 cargos, qui ont régulièrement mouillé, au moins jusqu’en novembre 2010, dans le port iranien de Bandar Abbas et dans l’île de Kharg.
Volant au secours des frères Ofer, l’ancien chef du Mossad (les services secrets) Méir Dagan fait valoir qu’« ils n’ont pas commercé avec l’Iran et n’ont pas contrevenu à la loi internationale car il n’y a pas de boycottage de l’Iran ».
Fertilisants, des pesticides, des semences
De fait, les sanctions onusiennes concernent le pétrole raffiné et non le brut. Selon le premier ministre Benyamin Netanyahou, la loi est catégorique. « Tout lien avec l’Iran est prohibé, dit-il, quelle qu’en soit la nature. » En pratique, pourtant, les divers ministères interprètent chacun à leur façon cette formule.
Des dizaines de sociétés liées au ministère de la défense se sont enrichies dans le commerce des armes avec la République islamique. Récemment encore, les Américains ont épinglé une société espagnole qui tentait de vendre à l’Iran des hélicoptères provenant d’Israël. Des compagnies israéliennes ont des relations d’affaires avec l’Iran, via des tiers basés en Turquie, en Jordanie, à Dubaï, en Égypte ou en Chine.
L’État hébreu exporte ainsi des fertilisants, des pesticides, des semences et du matériel d’irrigation. Des cargaisons d’oranges et de pommes auraient aussi été livrées. L’an dernier, lors de visites secrètes, une assistance d’ingénieurs-conseils israéliens a aussi été envisagée pour la construction en Iran d’usines de conditionnement alimentaire.
Israël importe via la Turquie du marbre
En sens inverse, Israël importe via la Turquie du marbre extrait dans des carrières appartenant au gouvernement iranien, ainsi que des noix de cajou et des pistaches. Avec les tapis et le pétrole brut, ces produits constituent les principales ressources de l’Iran.
Les peines encourues par le groupe Ofer – s’il a violé la loi israélienne – sont minimes. Véritable État dans l’État aux nombreuses ramifications politiques, il gère un empire qui fournit des emplois à des milliers de familles et aurait en outre rendu « des services » à la sécurité nationale.
Présenté comme l’homme le plus riche d’Israël avec une fortune estimée à 7 milliards d’euros, le PDG fondateur du groupe, Sammy Ofer, était le mieux placé pour parler, mais il est mort vendredi 3 juin, à 89 ans, des suites d’une longue maladie.
JOËL DAVID, à Jérusalem
http://www.la-croix.com/Actualite/S-informer/Monde/En-Israel-les-affaires-continuent-avec-l-Iran-_EP_-2011-06-05-621868